L'habitat performant
Intégrer l'humain dans la conception de bâtiments performants
Habitat
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Énergie
Plus écologiques, plus collectifs, tournés vers l’avenir, les logements passifs jouissent d’une aura positive dans nos sociétés. Paradoxalement les réflexions qui accompagnent ce type de projet n’intègrent pas toujours celui qui devrait être au cœur des considérations: l’habitant, qui se retrouve souvent sans le savoir cobaye d’innovations techniques pensées pour lui.
Précurseure au niveau mondial, la Région de Bruxelles-Capitale mène depuis plusieurs années une politique ambitieuse de développement des bâtiments à haute performance énergétique (HPE). Tout nouveau bâtiment se doit d’être performant c’est à dire d’intégrer des nouveaux standards dans la construction visant à limiter les dépenses en énergie. Ces nouveaux standards transforment l’usage des bâtiments pour ceux qui y vivent, les obligeant à s’adapter et faire évoluer leur manière d’habiter.
Dès lors, la compréhension des usages et des difficultés que l’appropriation de ces logements nouvelle génération peut provoquer est un enjeu majeur pour assurer la pérennité et le développement d’un programme de ce type à l’échelle d’un pays, mais aussi pour que l’image du développement durable et de ses promesses continue à être positivement reçue par la société.
C'est dans cette perspective que Méthos a accompagné Bruxelles Environnement en réalisant une étude sociologique menée au rythme des habitants bruxellois et de leur vie dans les logements performants.
L'écosystème des bâtiments
L’étude a privilégié est méthode inductive, c’est à dire de faire débuter le questionnement par le vécu des habitants dans le logements performants. Quatre bâtiments ont été choisis en région Bruxelles Capitale pour faire l’objet de monographies détaillées. Pour chaque bâtiment, des entretiens in situ ont été mené avec les habitants et une analyse des acteurs et des professionnels entourant les bâtiments a été menée (architectes, entrepreneurs, bailleurs sociaux et privés). L’analyse de l’ensemble de l’écosystème d’un bâtiment, du jeu d’acteurs et des influences de chacun sur le bon usage du bâtiment, a permis notamment de montrer que tout ne peux pas uniquement reposer sur l’habitant.
Les intentions et les questionnements de l’étude étaient les suivants:
• Quel est l’usage des bâtiments performants? Quelle est la perception des habitants? Quelles pratiques mettent-ils en place?
• Quel est l’écosystème entourant le bâtiment performant? Quels sont les acteurs? Comment s’organisent les relations?
• Comment mieux maitriser le développement du logement performant et favoriser l’appropriation et l’usage par les habitants?
Acteurs déconnectés
L’étude décrit la nature (ou l’absence) des interactions entre les professionnels du bâtiment et les habitants à toutes les étapes de son développement puis de sa gestion. Elle montre que l’habitant se retrouve souvent isolés une fois le bâtiment livré, devant faire face seul aux problèmes inhérent liés aux nouvelles normes de construction dans le passif. L’absence de dialogue, les problèmes de communication ou d’échanges formalisés impactent le vécu et l’appropriation des bâtiments pour les habitants.
Le travail ethnographique montre que le bâtiment performant est une construction sociale et que les mécanismes permettant son existence n’ont pas encore été pensés ni développés.
Différents modes d’habiter
Le logement performant met en place une norme de confort thermique standard pour tous (=19,5°). Or l’étude montre que le confort est une notion très personnelle, variant d’un foyer à l’autre, cette norme est donc constamment remise en question par les habitants qui adaptent leur confort thermique via des solutions d’appoint (chauffage électrique, ouvrir les fenêtres etc.) contre productives en terme de consommation d’énergie dans des bâtiments qui n’ont pas été conçus pour cela.
Les habitants ont non seulement un rapport différent au confort thermique mais ils se distinguent également dans leur rapport à la technique ou dans le rapport qu’ils entretiennent avec les institutions. L’étude montre que ces paramètres (rapport à la technique et rapport aux institutions) impactent de manière positive ou négative le bon usage du logement performant. Méthos a élaboré 4 profils d’habitants (voir schéma) pour comprendre ces différences et permettre de réfléchir à des pistes d’action.
Accompa- gnement à l’usage
L’étude a mis en avant le rôle pivot des “facilitateurs”. Habitant ou professionnel, architecte, gardien ou assistante sociale, les “facilitateurs” sont divers et s’improvisent en tant que médiateurs socio-techniques, dans toutes les situations où les habitants se sentent abandonnés.
La performance humaine est une une dimension essentielle à ajouter à la performance énergétique des bâtiments.
Co-conception de solutions
A la suite de l’étude, Méthos a lancé une démarche participative autour de la recherche de solutions et des pistes d’actions possibles, au travers d'ateliers de co conception réalisés avec Bruxelles Environnement dans un premier temps puis en réunissant l’ensemble des acteurs de la filière ainsi que les habitants.
Les ateliers visaient à diffuser les résultas de l’étude et faire prendre la mesure des enjeux d’une intégration de l’humain dans le développement des bâtiments performants mais également à trouver les moyens d’améliorer le fonctionnement de l’écosystème des acteurs entourant le bâtiment performant.
Méthos a une méthode de travail qui permet une réelle avancée dans le changement de paradigme lié aux enjeux climatiques, en partant du postulat que les progrès ne passeront pas uniquement par la technique.
Gaëtan Quinet, gestionnaire architecte, division énergie air climat et bâtiment durable. Bruxelles Environnement.
A lire:
• L’abstract des principaux résultats (version FR / version NL)
• Descriptif d'un des bâtiments étudié: le Belle Vue à Molenbeek (.pdf)
Projet a été réalisé en collaboration avec Gaëtan Brisepierre, sociologue de l’énergie.